Symboles et ornements 5

Provenant de l'un des nombreux funéraires que compte le cimetière de Bailleul et placée dans les réserves du musée De Puydt, la statue de Saint-Pierre est bien connue des membres de l'association Kerk Hof. Aussi, nous décidâmes qu’il était temps de lui dédier un article sur ce blog. Je vous fais donc part de mes recherches, par le biais de cet article.

• La statue de Saint-Pierre

Il s’agit d’une statue réalisée en terre cuite, et datant vraisemblablement de la seconde moitié du XIXe siècle. Le personnage représenté par l’artiste n’est autre que l’apôtre Saint-Pierre, identifiable par ses différents attributs : les clés, qu’il tient dans sa main droite, et le coq, présent à ses pieds. Ajoutons que Saint-Pierre est très souvent représenté sous les traits d’un homme d’âge mûr, portant la barbe, comme c’est ici le cas.

Selon l'Évangile de Matthieu, Jésus remet à Pierre les clés du Royaume des Cieux en ces termes : « Et moi, je te dis que tu es Pierre et que, sur cette pierre, je bâtirai mon Église et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elles. Je te donnerai les clés du royaume des cieux : ce que tu lieras sur terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur terre sera délié dans les cieux. » [Matthieu, 16, 18-19]

Dans l’iconographie chrétienne, le coq est associé à Saint Pierre. L’animal illustre en effet un passage de la Bible intitulé « Le reniement de Saint Pierre ». Saint Pierre, l'un des apôtres, fit un grand tort à son Maître, car il renia et jura qu'il ne le connaissait pas. C’est en entendant le coq chanter qu’il se ressouvint de ce qu'il avait fait et de ce que lui avait dit son bon Maître « Le coq ne chantera pas avant que tu ne m'aies renié trois fois » [Matthieu, 26, 34] et alors, reconnaissant sa faute, il sortit et pleura si amèrement que pour cela il reçut indulgence plénière et rémission de tous ses péchés.

Après avoir évoqué l’histoire des attributs de Saint Pierre, intéressons nous maintenant plus en détails à la statue. Le personnage de Saint-Pierre est ici placé sur un socle de forme octogonale d’une hauteur de 2cm. Au-dessous, un orifice appelé « trou de goujon », permettait le passage d’une barre ou tige de métal pour le maintien de la statue sur un support quelconque.
D’une hauteur n’excédant pas les 50cm, cette statue aux volumes modestes, n’en demeure pas moins une véritable œuvre d’art. Remarquez le soin apporté aux détails tels que la barbe, les plis du vêtement, les traits fins et délicats de son visage ainsi que les fines boucles de ses cheveux. (Voir photo 1) Notez aussi la grande expressivité du visage, et le regard chargé d’émotion de Saint-Pierre. Ce dernier invite à la dévotion, au recueillement.
Enfin, admirez le remarquable état de conservation de cette œuvre qui, après avoir passé plus d’un siècle exposée aux intempéries, a su garder toute sa grâce et son élégance, malgré la perte de sa polychromie. (Quelques traces sont visibles au bas de la statue.)

• La sépulture

Cette statue fut retrouvée couchée au pied d’un monument funéraire par M. Jérôme Steenkiste en 1999. Ce dernier l’apporta au musée Benoît De Puydt afin qu’elle soit protégée des intempéries et du vol. Tout ce dont M.Steenkiste se souvient, c’est qu’il la ramassa à proximité de l’îlot B au sein du cimetière communal. Aussi, après enquête, il semblerait que la statue provienne d’un monument, aujourd’hui laissé à l’abandon, datant du XIXe siècle et dédié à M. Charles Kretschmer. (Voir photo 2)

Charles Benoît Joseph KRETSCHMER est né le 25 prairial an 8 (calendrier révolutionnaire) à Bailleul. Il exerça le métier de cabaretier (parfois appelé débitant de boissons) et eut 3 épouses au cours de sa vie :

- Epoux en premières noces de dame Barbe Cécile JOYE (décédée en 1835)
- Epoux en secondes noces de dame Isabelle Claire BARTIER (décédée en 1854)
- Epoux en troisièmes noces de dame Rosalie Amélie Sophie BOUCKENHOVE (décédée en 1895)
Lui même décède le 11 septembre 1876 à l’âge de 76 ans, rentier, en sa demeure rue de Lille.

Le monument, de plan carré, possède à son sommet une petite plateforme de 15x15cm avec en son centre une tige de fer placée à la verticale et pouvant servir de goujon. Cet élément pourrait faire penser qu’une statue ou tout autre ornement décorait la partie sommitale du monument. De plus, des traces de ciment sont visibles sur cette plateforme, confortant l’hypothèse de la présence, jadis, de notre statue de Saint-Pierre. (Voir photo 3)

L’association Kerk Hof ne souhaite pas le retour de cette statue au cimetière, il serait en effet trop dangereux de laisser ce « trésor », cette œuvre d’art à la vue et à la portée de personnes mal attentionnées. Si vous souhaitez l'observer, sachez qu’elle est régulièrement exposée en vitrine au musée, alors pourquoi de pas aller y faire un tour ?
Lors de ma visite au musée, le régisseur m’a également précisé qu’un bas relief en plâtre, provenant lui aussi du cimetière, se trouvait dans les réserves du musée… Voilà de quoi alimenter mes recherches pour un prochain article. En attendant, soyez patients !

Références : http://www.archivesdepartementales.cg59.fr/

Remerciements : A toute l’équipe du musée Benoît De Puydt et plus particulièrement à Godeleine Valdelièvre, pour sa patience et ses précieux renseignements.